Un billet à quatre mains de Ludovic Dublanchet et Jean-Luc Boulin
Le mois dernier, Ludovic vous interpellait dans ces colonnes sur le thème “même pas peur” avec un constat : un peut partout, les privés comme les institutionnels se sentent menacés.
Les privés sont sous la pression des centrales de réservation internationales,et ressentent le besoin d’une nécessaire adaptation au web et à ses outils ultra-rapides
Le public est interrogé par la réorganisation qui arrive à grand pas et qui nécessitera des évolutions structurelles. Tout le monde ne subsistera pas en l’état, c’est évident. Et les mannes financières vont se tarir, c’est évident aussi. Comment, dans ce contexte adopter une dynamique entrepreneuriale?
Autre point d’interrogation pour les organismes institutionnels publics : comment exister aux cotés de Google Travel, de Booking, ou d’Airbnb ? La question lancinante : aura-t-on encore besoin des organismes publics, du CRT à l’OT, demain?
Mais non, même pas peur ! il y a aujourd’hui de bonnes stratégies à adopter, de nouvelles idées à défendre.
Aussi, Ludovic et moi-même avons rempli la hotte du père blog de 10 bonnes idées et pistes de réflexions, pour 2013, à la fois pour les privés et les institutionnels (on compte sur vous pour en ajouter quelques-unes en commentaires…) :
1. Soyez là où vont les mobinautes
Vous vous demandez si il faut faire une appli mobile pour votre territoire, qui soit déclinée sur l’appstore (pour l’iPhone) mais aussi sur Google Play (pour les Androïd) voire en mode Windows Mobile ? Même si vous réunissez le budget pour réaliser l’app, il faudrait quasiment le même pour la promo ! Une bonne idée, surtout si votre territoire n’est pas à la bonne échelle de déambulation touristique : être présent sur les plateformes mobiles utilisées par les clients. Ben oui, parce que tout possesseur d’iPhone ou de Galaxy Note ne commence par par télécharger spontanément l’application touristique du canton de Saint Germain les trois collines, aussi soignée soit-elle. Par contre, il utilisera les pages jaunes, les applis d’avis (tripadvisor, dismoiou) les outils de géolocalisation (Google Maps, Yelp), et Wikipedia Mobile. Comment votre offre est référencée sur ces cinq services mobiles? Seul investissement : du temps, du temps, et du temps…
Pensez également aux applications des guides touristiques, qui bénéficient souvent d’une bien meilleure exposition sur les stores d’applications. Et si la solution était finalement de jouer au “simplificateur”, et vous aussi, de remplir votre hotte avec les dix applications qui seront utiles au touriste sur votre territoire (comme le fait très bien l’Office de Tourisme d’Ascona Locarno par exemple, ou encore de simples blogueurs eux-mêmes, avec un véritable intérêt à ouvrir les commentaires sur un tel sujet), en l’adaptant aux différentes clientèles visées ?
2- Adaptez votre site à une consultation en mobilité
Cela ne coûte pas bien cher et devient nécessaire au vu de l’équipement et des usages qui se développent ! Songez que 2013 est peut-être la dernière année au cours de laquelle la consultation sur un terminal fixe seront encore devant celles en consultation mobile. Vous refaites votre site ? Pensez “Responsive design”, pour que votre client/prospect qui prépare sur son smartphone ou sa tablette dans le train ou chez le médecin ne soit pas décontenancé en voulant poursuivre sur son grand écran le soir… Et prenez exemple sur les navigateurs (Chrome, Safari, Mozilla,…) qui permettent de “partager” sa navigation quel que soit le terminal utilisé, grâce à son compte. Le retour du compte client et du panier est d’actualité !
3-L’Internet de Séjour, c’est votre responsabilité
La mobilité, c’est en préparation, mais aussi sur place ! Un site mobile, une web app pour profiter (et consommer) au maximum la destination, c’est nécessaire aujourd’hui. L’information est triée, va à l’essentiel, et là encore, nécessite d’être pensé à la bonne échelle de destination.
Et pour assurer une navigation fluide, vous qui n’êtes pas encore desservis par la 4G (songez également que d’ici fin 2013, ce sera le cas d’une grande partie de votre clientèle qui habite dans les grandes agglomérations), pensez à la connectivité de votre territoire ! Les cartes très précises de l’ARCEP vous donneront des éléments à ce sujet. Au-delà, la mise en place d’un wifi territorial s’avèrera indispensable, et peut devenir un réel avantage concurrentiel. Regardez vos hébergeurs être choisis, qualifiés par la qualité de leur wifi presqu’autant que celle du matelas ou du petit-déjeuner, et s’il en était de même avec les Destinations demain ? Pierre Eloy nous en parlait avec la présentation de son concept d’Internet de Séjour… le mouvement est lancé, ne ratez pas le train !
4- Travaillez la qualité de votre information
Institutionnels, changez de métier (1) ! A vous seul, allez-vous pouvoir assurer l’ensemble de la promotion, de la commercialisation de la destination et de ses entreprises? Non, lorsque l’on voit les parts de marché des majors de la distribution internationale, et les moyens que nécessitent aujourd’hui la promotion à l’échelle internationale, voire même nationale. Par contre, l’organisme de gestion de la destination apportera de la valeur ajoutée dans la conquête des clients, et dans l’information complète détaillée, : du contenu, du contenu, de la simplicité, de la simplicité. Soyez juste le meilleur pour parler de votre destination, et si vous êtes repris par des sites qui font référence, qui font venir des touristes chez vous, vous avez fait votre job !
5- Les entreprises touristiques ont besoin de vous
Institutionnels, changez de métier (2) : aidez vos entreprises à exister sur le web, et à être concurrentielle, à être référencée et trouvable; Lorsque l’on sait qu’un hébergement non réservable en ligne perd 82% de chances de vendre une nuitée, il faut que les OGD fassent du développement économique et de l’accompagnement des entreprises ! Vive l’animation numérique de territoire, il faut continuer…collectivement ! L’Animation Numérique de Territoire permet de créer un nouveau relationnel avec vos sociopros, profitez-en par faire passer l’ensemble des messages, et considérez que chacun d’entre vous doit avoir un minimum de culture numérique pour également faire passer ceux de l’ANT.
6- Ré-investissez le champ de la réservation en ligne
Vos prestataires sont en train de se faire manger par les OTA’s avec des taux de commissionnement et des clauses contractuelles exorbitantes. Claude Boumal signalait dans sa lettre ce billet de Travolution rapportant qu’avec une moyenne de… 49 p.c., les commissions versées aux agences en ligne par les hôtels londoniens ont bondi de 151% cette année ! Pour lutter contre ce phénomène, l’hôtelier londonien Umi Hotels a développé une plate-forme destinée à aider ses confères indépendants à s’affranchir de leur gourmandise. Compatible avec tous les systèmes, y compris les tablettes, recourant au ‘ responsive web design ‘, elle comporte un outil de gestion de contenu et un système de réservation multilingue.
Chez nous aussi, une forme de rebellion s’organise, notamment autour d’une association d’hôteliers qui veut promouvoir auprès de ses collègues et partenaires la réservation en direct. Mieux connaître les métiers de vos socioprofessionnels et les conditions dans lesquelles ils travaillent, les accompagner sur ces démarches qui bénéficieront à tous (clients, prestataires, destinations) relèvent du rôle d’un OGD.
7- Mutez les budgets sur la photo et la vidéo
On parle de contenu, et de séduction. Mutez les budgets : pourquoi ne pas investir plutôt sur de la réalisation de photos et vidéos professionnelles plutôt qu’investir dans votre site web ? Et à l’opposé, pourquoi ne pas également davantage utiliser les formations existantes, avec des stagiaires qui pourraient en un été vous tirer un portrait plus avantageux des prestataires de votre territoire (encore une fois, allez voir les locations chez Airbnb), de votre destination ? Organiser une balade/randonnée photographique avec vos habitants, résidents secondaires, touristes pour autour des conseils éclairés d’une de vos collaborateurs, d’un local pro-am, puis d’un apéro convivial sélectionner les meilleures pour faire vivre vos supports ? Vous serez repris par ailleurs, sur d’autres sites : c’est se servir de la visibilité de ceux qui ont besoin de vous et de contenus. A l’heure de la Big Data, de l’éclosion du web sémantique, du Knowledge graph de Google, vos contenus seront bien davantage vus ailleurs que sur votre propre site !
8 – Ouvrez vos contenus sans retenue
Nos contenus sont aussi de plus en plus vus, partagés, sur les réseaux sociaux. La récente étude de Text100 nous démontrait que Facebook et autres plates-formes sociales jouaient un rôle non négligeable dans le choix d’une destination, Pinterest, Instagram et autres applications basées sur la photo continuent de rencontrer un succès certain, et Google+ vient de lancer LA killer application qui pourrait enfin le voir décoller avec ses communautés. D’ores et déjà, on y retrouve beaucoup de contenus liés au voyage, et donc aux destinations. Alors, partagez vos contenus!
9- Google ne sera pas toujours gentil !
Attention Google Maps n’est pas philanthrope, et déjà, les gros utilisateurs (plus de 1000 requêtes jours) sont soumis à un droit d’usage. Et même si aujourd’hui les associations à but non lucratif sont exonérées, on peut imaginer que l’utilisation de la cartographie soit de plus en plus cher. Un conseil : ne mettez pas vos deux oeufs dans le même panier, penser alternatif à Google Maps (avec Open Street Map par exemple qu’évoquait Sébastien dans ce billet).
10- Adoptez l’évaluation systématique
Aucun résultat sans objectif, aucune analyse sans outil ! Le numérique nous offre la possibilité de tirer énormément d’enseignements de nos expériences grâce aux statistiques qui sont fournis, quelles que soient les plates-formes utilisées (site web, page facebook, compte twitter, QRCode, appli mobile, …).
Déterminez vos clientèles, vos objectifs stratégiques, les outils et plates-formes qui correspondent, déterminez des objectifs chiffrés, analyser le coût objectif et regardez vos résultats ! Si vous respectez ce schéma, vous serez en mesure de démontrer clairement ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas, et pourquoi (mauvais choix, mauvais contenus, manque de ressources humaines, financières, …) et pourquoi pas, d’y remédier ! Sans perdre de vue que si vous investissez sur du contenu mis à disposition, il est fort probable que les fréquentations physiques comme numériques de votre Office, structure, soient en baisse ? Est-ce pour autant que vous n’êtes plus utile au rayonnement de votre destination, certainement pas, encore faudra-t-il le prouver !
Votre futur passe indéniablement par une professionnalisation encore plus importante, un fonctionnement résolument entrepreneurial (je me fixe des objectifs à remplir et j’analyse les résultats à partir d’éléments tangibles) et la prise de conscience que l’éventail des champs à occuper est probablement trop vaste pour ne pas le confier à des équipes mieux dotées à tout point de vue !
Alors on se fait tous une promesse collective, si demain seuls quelques énergumènes planqués à Bugarach s’en sortent…on oublie ce billet, mais si après la trêve des confiseurs on se retrouve sur ce blog, c’est pour une année 2013 qu’il va falloir mener sur les chapeaux de roue, avec une stratégie globale, déclinée sur le numérique, déclinée sur les contenus, dans laquelle l’ensemble de l’équipe s’embarque, élus et sociopros compris !