A force de ne parler que du phénomène AirBnB, on aurait tendance à croire qu’il n’y a que cette plateforme qui a utilisé les révolutions du numérique et de l’économie du partage pour développer l’hébergement chez les particuliers. Or, si le parc d’offre en locatif chez les particuliers s’accroit de manière exponentielle et ubérise largement l’hébergement traditionnel, les acteurs sont nombreux et très divers.
J’en prendrai pour exemple l’étude réalisée cet été par Anne Catherine Picard, dans le cadre de son projet de fin d’étude de master AGEST. Son challenge? Analyser 22 plateformes d’hébergement collaboratif qui proposent des offres sur la Région Limousin, afin d’éclairer le Comité Régional du Tourisme sur le poids de ces nouveaux acteurs.
L’étude s’est appuyée sur 22 plateformes en ligne, issues pour la plupart du Panorama des nouvelles tendances du voyage collaboratif : entre précurseurs et pervertis publié en 2014 sur le blog par Mathieu Bruc, et augmentées des nouveaux entrants 2015.
L’étude n’a pas inclu Leboncoin.fr, qui est un peu partout le premier annonceur dans sa rubrique « location et gîtes ». Elle n’a pas non plus itnégré l’offre de couchsurfing, présente notamment sur www.couchsurfing.org et hospitality.club.
L’étude montre que l’offre collaborative regroupe 6% des lits marchands de la Région, une fois les doublons (annonces présentes sur plusieurs sites) traités. Si on rajoutait Leboncoin.fr, on dépasse les 10%. Sans parler du couchsurfing! Raison de plus pour s’intéresser à l’hébergement chez les particuliers de manière urgente.
Une AirBnBisation galopante
Sans surprise, c’est AirBnB qui est en tête du classement avec 419 offres sur la région Limousin, nombre d’offres qui a doublé en un an. Les challengers d’AiBnB sont loin derrière, qu’il s’agisse de BedyCasa, Sejourning, Wimdu, Roomlala (nouveau nom de « chambre à louer », Housetrip ou MisterBnB. Mais cumulées, ces plateformes représentent 60% de l’offre d’AirBnB. La difficulté sera de déceler les éventuels doublons, ce qui a été fait dans l’étude précitée.
Echanges de maisons : vers le troc de nuits
C’est sans doute dans ce domaine qu’interviennent de nouveaux acteurs et une offre grandissante. Ainsi, dans une région comme le Limousin, on trouve les plateformes traditionnelles dans l’échange de maison : il s’agît de Echangedemaison.com, Home for Exchange ou Homelink. Mais leur présence est tout à fait marginale. Ce qui est plus étonnant, c’est le développement des nouvelles approches vraiment basées sur le collaboratif. Ainsi la société Guest to Guest a mis en place un système de points. Le site propose un système d’échange réciproque ou non réciproque, simultané ou différé, à l’aide d’une monnaie virtuelle les Guest Point. On n’est plus donc sur de l’échange de maisons aux mêmes dates, mais sur un système de débit-crédit. Autre différence : pas de frais d’inscription pour le service. Succès immédiat, on dénombre 105 offres ont été repérées en Limousin, soit 20% d’AirBnB!
Plusieurs nouveaux entrants du collaboratif sont dans le même système de points, à l’image du français Trampolinn qui pratique le nightswapping. Le site offre la possibilité de loger chez l’habitant ou de recevoir chez soi avec un système de points gagnés ou dépensés pour chaque nuitée. La startup annonce en septembre 2015 34 000 membres, 15 295 logements, 443 échanges ou séjours pour un peu plus de 2000 nuitées. Pour une plateforme qui a un an d’existence, la croissance est rapide, ce qui montre bien l’intérêt du collaboratif avec un système de points. Pas de frais pour mettre en ligne son appartement, pas d’échange d’argent, et une liberté totale de choix dans l’échange de maison ou d’appartement. Ainsi, je peux recevoir dans mon appartement lyonnais des membres de la communauté, et en échange, utiliser mes points pour un week-end à Barcelone.
Nightswapping, le principal concurrent dans le troc de nuits entre particuliers, annonce 150 000 membres dans plus de 160 pays.
De l’intérêt de s’intéresser à l’hébergement collaboratif.
L’étude analyse également l’hébergement de plein air, comme le Gamping, avec des plateformes comme Camp in my Garden ou Un lit au pré. Mais au final, l’hébergement de plein air reste toujours marginal dans l’offre collaborative.
Au final, si on compile l’ensemble des plateformes collaboratives, les sites d’annonces comme le BonCoin.fr, et le couchsurfing, l’impact de ces nouveaux types d’hébergement est considérable : autour de 15% des lits marchands d’une destination. Certes, les taux de remplissage ne sont pas toujours ceux de l’hôtellerie, mais le chiffre est tout de même non négligeable.
Il est peut-être temps de rajouter ça dans l’offre touristique de la destination, et de le présenter à la prochaine assemblée générale ou au prochain conseil communautaire, manière d’accélérer la prise de conscience locale….
Vous pourrez découvrir l’intégralité du PFE d’Anne-Catherine et télécharger la liste descriptive des plateformes collaboratives ici.