Cet article a été publié sur le blog etourisme.info en septembre 2016. Durant la coupure estivale, nous vous proposons de redécouvrir les meilleurs moments du blog de l’année passée.
La récente lecture du troisième rapport Life At Home conduite par Ikea dans le monde sur la façon dont les gens vivent chez eux est très intéressante. 12 000 personnes ont été interrogées dans 12 villes du monde. Elle confirme plusieurs points détectés par de grands opérateurs du tourisme comme les compagnies aériennes ou les plateformes d’hébergement, Airbnb en tête, que je vais développer après l’exposition des faits.
Quelques chiffres choisis au sein de cette étude mondiale :
- 38% des personnes interrogées considèrent le quartier dans lequel elles vivent comme faisant partie de leur maison
- 42% se sentent davantage chez elles à l’extérieur que dans l’endroit qui leur sert d’habitation
- A Shanghaï, 49% pensent qu’il est plus important d’avoir un bon wifi que de disposer d’espaces sociaux à la maison
Je pourrais citer d’autres indicateurs, mais le sommaire de cette étude est suffisamment évocateur : « Le chez soi, un voyage sans fin ». Nous sommes de plus en plus nombreux à voyager dans le monde (1 milliard 186 millions en 2015 selon l’OMT, dont 51% dans l’Eurasie) mais finalement, si nous laissons bien notre maison sur place, nous avons envie de retrouver un chez soi, une vie de quartier, des repères rassurants.
Chacun voyage avec sa tanière en bandoulière
Par ailleurs, une étude d’Europe Assistance sur les intentions des Européens en matière de vacances d’été en 2016 révélait plusieurs points intéressants :
- Les Français se distinguent par une préférence marquée pour la location saisonnière (38%) par rapport aux autres Européens et plus que ça, ils sont les plus intéressés par la location d’un logement de vacances directement auprès d’un particulier (46% contre 34% en moyenne pour les Européens)
- Le budget des Européens pour ces vacances 2016 était de 2247 € et celui des Français tombait pile poil dans cette moyenne à 2233 €
Le succès historique des Gîtes de France et désormais d’Airbnb à 10 millions de voyageurs accueillis par les hôtes responsables des 300 000 hébergements français, qui font de notre pays le deuxième au monde pour la marque, confirme cela.
Le prix, le prix, le prix : voilà une requête qui crée l’attention et dirige les voyageurs. Les Easy Jet et Kayak, parmi d’autres, en font un bon usage en le liant pour Easy Jet à de l’inspiration. Le mot est certes à la mode mais il correspond à une vraie tendance. Si avant il était clair pour beaucoup de gens que les vacances ou les week end ne pouvaient se dérouler qu’à Saint Jean de Monts, Honfleur ou Cassis, ce mouvement de fidélisation, d’attachement à un lieu, recule. D’ailleurs le phénomène typiquement française de la résidence secondaire s’estompe. Celle-ci ne fait plus recette.
Encore plus vrai, on assiste depuis quelque temps à une montée de colère de la part d’habitants qui n’en peuvent plus de voir débouler des bambocheurs qui déplacent leurs pratiques : Barcelone est dans ce cas. Elle n’est plus une destination touristique pour ce public urbain en recherche d’émotions nocturne, d’une desserte aérienne, d’un prix et d’une location comme à la maison.
La vie locale à ma sauce plus importante que le reste
J’émets une hypothèse : la destination touristique en tant qu’objet d’attention dans le choix d’un départ va compter moins dans le futur que dans le présent. Les fondamentaux du tourisme vont perdurer pour les villes ou destinations appelantes (Paris, Venise, Capri…) mais de nouveaux entrants sont à prendre en compte :
- l’inspiration pour des moments de vie quotidienne
- le fait que de plus en plus de prospects méconnaissent la géographie et les cultures locales et c’est bien normal car le champ de vision de notre monde s’est élargi
- la mondialisation à l’œuvre qui aplanit les différences en créant d’immenses concentrations urbaines : 80% des Européens soit des urbains (54% à l’échelle mondiale)
- le développement des transports et la maîtrise, voire diminution, de leurs prix
- le fait que les prospects aient envie de rencontres rassurantes et intimistes (la peur de l’autre en tant que masse et des attentats…)
- le besoin d’histoires et de souvenirs palpitants de chacun d’entre nous (on n’a jamais autant pris de photos et à plus forte raison de vidéos)
Tout cela m’incite à penser que de plus en plus de prospects sont prêts à partir n’importe où pourvu qu’ils aient le sentiment de se retrouver chez soi. Avec leurs habitudes (les images qui suivent sont issues du groupe hôtelier Westin). Finalement ce qui compte c’est le d’où on part et où on revient, pas tant le où on part. Cela est aujourd’hui surtout vrai pour les secondes vacances ou pour les voyages, moins pour les vacances d’été encore principales et au cours desquelles la fidélité à un lieu est puissante.
Et du coup cela pose la question du travail de fond des destinations pour déterminer les instants à vivre et les saveurs qu’ils procurent à tout un chacun. Mais cela va bien plus loin me semble-t-il aussi dans l’organisation des moteurs de recherche (aujourd’hui des grands opérateurs touristiques, peut être demain dans les destinations) avec une vraie réflexion sur les critères prioritaires à présenter, voire sur la diminution de leur nombre comme chez Trivago qui est spectaculairement réduit à sa plus simple expression.
Vous avez 4 heures :).