(re)trouver le goût du voyage

Publié le 9 septembre 2020
6 min

Slow tourisme, tourisme de proximité, micro aventure,… oui, tout cela est en accord avec mes valeurs mais concrètement comment fait-on taire cette petite voix qui nous dit que nous ne ressentirons jamais les mêmes émotions que lorsque l’on découvre un pays pour la première fois? J’adore explorer ce qui se passe autour de chez moi mais le voyage, le véritable voyage me semble lié à l’ailleurs (c’est à dire très loin d’où j’habite et où mes repères sont chamboulés avec une autre langue, une autre cuisine, une autre culture,…).

Sauf que ça c’était avant! C’était avant de  partir 5 jours en fin d’été avec une amie, notre sac à dos sur les épaules et pour unique projet de faire le tour de la merveilleuse Belle-île à pied (à deux heures de route de chez nous).

On s’imaginait passer du temps ensemble, marcher (un peu), dormir en plein air, papoter (beaucoup), se faire de bon petits repas (crêpes beurre sucre) mais nous étions loin de nous douter de tout ce que cela allait nous apporter.

Alors cette aventure porte-t-elle les prémices d’un nouveau rapport au voyage ou est-ce  juste le récit d’une belle aventure. J’ai tenté ici de décrypter ce qui a changé pour moi et ce pourquoi j’ai eu la sensation d’avoir vraiment voyagé au sens où je l’entends. 

(Vous ne trouverez pas ici d’ascension de monts incroyables (car nous ne sommes pas de grandes sportives) ni de nuit dans des bivouacs à faire pâlir instagram  (car nous sommes un peu trouillardes), voilà, vous êtes prévenus 🙂 ! )

1 – Ce qu’on a du tout de suite abandonner

Ne partir qu’avec l’essentiel :

L’aventure commence quand tu prépares ton sac et que tu te demandes comment tu vas réussir à faire entrer toute ta vie (ou ton nécessaire vital)  dans ce sac à dos, qui te semble finalement bien petit. En sachant qu’après avoir mis ta tente, ton duvet, ton sac à viande, ton matelas, il ne reste vraiment pas de place pour le superflu. Donc adieu, les jolies baskets et le petit haut pour aller prendre un verre au bar du coin 🙂 et place au short et aux chaussures de rando!

Voir tous les hauts-lieux touristiques de l’île

On s’est rapidement rendu compte qu’on n’allait peut-être pas tout voir de l’île et que ce n’était pas grave. Qu’il allait falloir assumer à notre retour auprès de nos amis que « non, nous n’avons pas vu cette jolie petite église blanche incontournable », car ce jour là, il pleuvait des cordes, qu’on avait bien galéré et qu’on avait juste envie d’être au chaud dans un café.

Tout planifier, tout contrôler, tout formater

Vous savez ces fameux plans sur la comète, que vous vous faites après avoir surfé sur tous ces  blogs de voyage, qui vous font rêver.  Nous, on a dû revoir nos plans très rapidement en acceptant de ne pas faire tout le tour de l’île par le chemin côtier comme nous l’avions planifié parce que c’était sans compter sur le poids du sac à dos, notre fatigue et surtout les dénivelés. 

 

2 – Ce qui s’est modifié petit à petit 

Notre regard sur  les paysages

Au rythme du pas , les paysages et la nature se laissent apprivoiser d’une autre façon. Je suis sensible aux beaux paysages mais j’ai un peu de mal à rester les contempler longtemps. Et bien là, nous nous sommes surprises à ressentir un certain plaisir chaque jour, limite addictif,  à fouler le sol caillouteux de l’île, à respirer l’air marin et à contempler les plantes sauvages. Un rapport privilégié aux paysages, d’exclusivité même s’est installé, facilité par le fait de  ne pas arriver comme on aurait pu le faire en voiture au plus près du site à visiter,  de le découvrir (assez) rapidement et de repartir pour enchaîner vers un autre lieu.

Notre regard sur les villages

Lors de nos chemins de traverse pour gagner un peu de temps et éviter les dénivelés importants, nous sommes passés par des petits villages. Des villages qui ne font pas la carte postale de l’île car ils ne sont pas aussi photogéniques que les maisons aux façades colorées de Sauzon par exemple.  Mais ces villages, où on peut facilement imaginer la vie des habitants m’ont laissé  une perception de calme, de sincérité, sans artifice à l’opposé du souvenir que j’avais pu avoir en découvrant l’île quelques années auparavant via les axes routiers, où la beauté de l’île m’avait complètement échappé. 

Notre regard sur les gens

Le plus surprenant a surement été les rencontres, que nous avons faites au hasard des chemins. Ce chien qui nous a accompagné et guidé sur le chemin côtier la première journée (doutant très certainement de notre capacité d’orientation). Marithé, notre voisine de camping, grande marcheuse et habituée de l’île depuis plus 25 ans et connaissant tous les chemins,  qui sera notre bonne étoile pendant tout ce périple. Mona, notre fêtarde gérante d’un food truck, qui a transformé un déjeuner sous la pluie en un vraiment beau moment de rencontre et d’échange sur des airs de dirty dancing. Des rencontres,  qui ont été finalement plus accessibles, plus simples aussi et  certainement facilitées  par notre sac sur le dos, loin des statuts et des étiquettes de chacun.

 

3 – Ce qu’on a appris : 

La lenteur

Rien que le mot lenteur, me donne des boutons mais ici pas le choix, nous avancions au rythme de nos pas, en acceptant notre fatigue et nos courbatures. A ma  grande surprise, la lenteur, n’a pas été synonyme d’ennui. Nous n’allions effectivement pas faire le tour de l’île en 3 heures mais nous allions découvrir bien plus et surtout nous imprégner bien plus profondément de l’île (son odeur, ses lumières, sa matière, ses visages,…)

Le vide

Accepter d’attendre sans se réfugier dans son téléphone pour laisser de la place au vide fut aussi un apprentissage précieux.  Attendre sa navette de bus plus d’une heure et finalement rencontrer ce marcheur retraité qui nous offre un café et avec qui on parle voyage. Attendre plus de deux heures avant que la réception de l’auberge de jeunesse n’ouvre et finalement passer un chouette moment avec quelques occupants de l’auberge.  Laisser du vide, abandonner l’obsession de remplir les moindres minutes de nos journées, ce fut finalement se laisser l’opportunité de laisser de la place à l’imprévu et aux belles surprises.

La liberté 

La liberté de pouvoir choisir l’endroit où dormir, où pique-niquer...  La liberté de pouvoir être et faire son voyage loin des “il faut que », « il faut que tu ais vu ça et fait ça, ça et ça et aussi ça “ « il faut que tu reviennes bronzée car tu es un peu blanche »  « il faut que tu sois reposée ……il faut que……il faut que…… 

 

4 – Ce qu’on aurait adoré s’accorder (avec du recul): 

Pour être tout à fait honnête et ayant fait ce voyage dans une certaine sobriété, deux trois petits services n’auraient pas été du superflu :

  • se faire livrer des bon petits plats en fonction de nos envies : frais et locaux pour des repas adaptés à nos journées sportives 
  • s’offrir une nuit dans un hôtel avec une véritable green attitude ( rien de pire que d’être hébergé dans un établissement non vert après avoir passé sa journée au grand air)
  • et être en lien avec un expert terrain, à l’image de notre retraitée Marithé, connaissant tous les recoins de l’île (et surtout les dénivelés 🙂 ) , nous faisant un point météo (très changeante sur l’île), nous accueillant à l’arrivée du bateau et nous assistant même pour trouver le meilleur spot de bivouac. Un expert, rassurant, disponible, et sympathique (of course), connaissant bien notre profil (pas de grandes marcheuses) et nos envies.

 

Alors tourisme lent, propre et curieux,  c’est un peu de tout ça en même temps. Ce qui restera avant tout ce sont ces paysages incroyables qui sont imprégnés en moi comme jamais, ces rencontres improbables au détour des chemins et  finalement ce voyage, ce voyage où j’ai pu  retrouver les valeurs qui me tiennent à cœur :  plein air, entraide, gentillesse, spontanéité, simplicité, confiance et inattendu. C’est peut-être un peu tout ça finalement que je cherchais sans le savoir.

 

 

PS : Merci à ma compère qui a osé relever le défi avec moi!

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Experte en approches humaines innovantes, j'accompagne les destinations touristiques à engager leurs équipes sur les sujets qui leur tiennent à cœur. J'utilise la facilitation en intelligence collective pour accompagner ces projets et ces conduites de changement. J'étais, jusqu'en avril 2019, Directrice de l’Office de Tourisme du Pays d’Ancenis -Val de Loire, où j’avais notamment en charge les missions traditionnelles concernant le management d’équipe, les stratégies de communication, l'ingénierie de projet, [...]
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