Difficile d’y voir clair dans toutes ces annonces, enquêtes et études qui se succèdent depuis que la MICE a retrouvé un semblant de normalité à la suite de la crise sanitaire.
Une reprise en flèche avec l’effet « report », l’envie, voire le besoin de se retrouver physiquement, mais aussi un besoin de rationaliser des coûts qui ont été coupés pendant deux ans, on ne sait pas trop sur quel pied danser : on disait parlait d’une « reprise rapide et forte » encore l’automne dernier à l’IFTM, mais la Global Business Travel Association s’est voulu moins optimiste à l’ITB à Berlin la semaine dernière, envisageant un retour à la normale pour 2026.
Et cela a probablement trait à l’incroyable atomisation de ce fourre-tout qu’est le MICE, comme nous le disait Nicolas Martin dans son récent billet sur le sujet. On se gardera bien des grandes généralités, tant la grande conférence internationale annuelle pourra être tellement différente du séminaire interne de la petite PME, ou au contraire semblable !?
La crise sanitaire a tout bouleversé !
Pendant presque deux ans, tout a changé, et il en reste forcément des stigmates, des avancées positives, des questionnements toujours en cours.
Premiers budgets coupés, de façon durable sur au moins deux exercices, voire davantage, ils reviennent rarement à leur niveau d’avant crise, d’autant plus dans ce contexte d’inflation et d’incertitudes économiques. Les services commerciaux ont dû s’adapter, gérer en ligne, et beaucoup de directions estiment que l’on peut aujourd’hui faire aussi bien qu’hier en se déplaçant moins.
A contrario, la crise sanitaire a permis le développement du télétravail, considéré comme un confort par beaucoup de salariés, une économie potentielle par certaines entreprises, mais une rupture du lien par tous. Cette situation s’étant définitivement installée, le maintien d’une relation forte et d’un esprit d’équipe passe par des rassemblements, qui ne peuvent plus parfois se tenir dans les locaux de la société (qu’elle a revu à la baisse), ou tout simplement parce que la salle de réunion interne accompagné des plateaux-repas ne contribue guère à cet objectif.
Et cela sera d’autant plus vrai dans les secteurs où les RH sont en forte tension ! Le maintien d’un minimum d’investissement dans le MICE, que ce soit le grand salon annuel, les séminaires internes ou le maintien d’un minimum de prospection physique pourrait devenir un réel argument à l’embauche, comme peuvent l’être les RTT et aujourd’hui le nombre de jours en télétravail.
Du côté de l’offre aussi, tout a changé ! Nombreux sont les Centre de Congrès, les salles de réception ou hôtels à avoir investi pour maintenir leurs activités : certains ont crée de véritables plateaux pour lancer des événements digitaux, maintenir un visitorat grâce aujourd’hui à des événements hybrides qui peinent à trouver leur public. Si Zoom, Teams et consorts se sont clairement imposés comme des outils incontournables, maintenir une véritable interaction, participation avec un visitorat en ligne nécessite quasiment une double organisation rarement rentable. Et que dire de l’attention du salarié lors d’un workshop ou d’une formation en ligne au-delà d’une heure… Que celui qui n’a jamais décroché lui lance la première webcam !
Les formats « Full Digital » et « Hybride » sont en baisse malgré les lourds investissements consentis et les grandes réflexions, tests de plates-formes que beaucoup d’organisations ont menés pendant ces dernières années.
La tendance semblerait donc être aux plus petits événements, dans de plus petits environnements, ce qui laisse à penser d’ailleurs que les petites agglomérations, et même des équipements de qualité en milieu rural, auront davantage leur carte à jouer que par le passé.
Durable et RSE deviennent essentiels
Ce n’est pas nouveau allez-vous me dire, mais cela se renforce, et sans retour en arrière possible. Bien que la récente enquête d’Interface Tourism nous révèle un retour à l’international, et au-delà de la rationalisation des coûts, l’intégration de la réflexion RSE dans la politique MICE est devenue prépondérante. En interne, vis-à-vis des objectifs que de plus en plus de sociétés se fixent, vis-à-vis des convictions de leurs salariés, et peut-être davantage encore de leurs futurs collaborateurs. Et bien entendu en externe, le bad buzz d’une mauvaise comm’ sur les réseaux sociaux et l’accusation de green washing jamais à plus de quelques clics !
Les déplacements aériens sont bien entendu parmi les premiers impactés, et l’on privilégient le train, le co-voiturage, et par conséquent des destinations moins lointaines, mais aussi mieux desservies, mieux équipées.
Au-delà du seul transport, de loin le plus impactant en terme de bilan carbone, c’est toute la chaîne des nombreux prestataires impliqués dans un congrès, une convention, un séminaire qui va désormais être scrutés par le client, les participants, la presse… Bouteilles, verre et couverts, choix des matériaux pour les stands ou installations éphémères, approvisionnement des repas, choix des hébergements, la liste est longue et l’expérience s’accroit après chaque événement !
Les Organismes de Gestion de Destinations, souvent moteurs, comme le soulignait Nicolas, souvent sollicités, devront jouer un rôle et assumer pleinement leur mission de coordination sur ce volet. Alors qu’ils seront souvent prescripteurs, ils ne pourront se permettre de voir dévaloriser « l’expérience durable » d’un événement parce que l’un des maillons ne s’est pas conformé au strict cahier des charges. C’est d’autant plus délicat à gérer que l’on parle d’un secteur ayant souvent recours à une main d’oeuvre « volatile » (accueil, traiteur, sécurité, montage de structures, …) qui bénéficient de peu de formation interne, et va pourtant se trouver en première ligne.
Sur ce sujet comme tant d’autres, la connaissance approfondie de ses prestataires, de leurs engagements, compétences, limites va devenir fondamentale.
La « fameuse expérience »
Et oui, dans le MICE aussi on peut avoir droit à une expérience , et peut-être même encore davantage que dans le tourisme de loisirs. D’abord parce que l’organisateur, du congrès, du séminaire, du rendez-vous, … tient à fidéliser son participant, son collaborateur, son client, prospect. On ne lésine sur l’activité, le petit à-côté sympa, le volet VIP si l’on souhaite se différencier et rester en mémoire.
Et là encore, les OGD ont clairement leur rôle à jouer. Quoi de plus valorisant pour un événement, une entreprise, un rendez-vous de se sentir accueilli de façon personnalisée. Certaines destinations proposent aux grands comptes un accueil en grande pompe, style Jeux Olympiques : de l’aéroport à la gare, dans les hôtels ou les restaurants partenaires, et bien entendu au Centre des Congrès, on multiplie la signalétique et les attentions pour bien vous faire comprendre que vous êtes attendus et que l’on va vous choyer ! Cela peut demander de grands moyens, mais aussi parfois de simples attentions, notamment sur de plus petites destinations : prévoir un accueil sympa et inattendu, s’organiser pour que quelques prestataires soient ouverts alors que ce n’est normalement pas le cas : un resto ou un bar par exemple, et le problème ne se pose pas que le dimanche soir ou le lundi selon la saison, ou qu’ils disposent d’un ou deux extras pour assumer la charge de travail supplémentaire quand 20, 50 ou 600 personnes vont débarquer.
Oui, le MICE est peut-être un secteur d’avenir pour de toutes petites destinations, mais il ne le sera qu’à condition que toute la chaîne se mobilise pour offrir une expérience de qualité que l’OGD devra piloter et fédérer s’il veut fidéliser et créer de la prescription !