Tu as participé à l’édition des rencontres nationales du etourisme à Pau cette année et à ton retour tu as eu la traditionnelle question “Alors, c’était comment Pau ? ”. Et…. ta réponse a ressemblé à quelque chose du type “C’était vraiment chouette…., j’ai repéré deux, trois sujets sur lesquels on pourrait travailler, il faisait beau et la soirée était très sympa…..”. Mais tu sens au fond de toi que ces rencontres étaient bien plus que ça.
Et si les rencontres du etourisme répondaient en effet à leur promesse de rencontres justement. Rencontre au sens où Charles Pépin, philosophe et romancier, l’explique dans son dernier livre intitulé « La rencontre – une philosophie » (Charles Pépin qui était invité au colloque sur le tourisme du futur à Nantes pour partager sa vision du voyage)
(Aucune prétention dans ce qui suit de faire un article philosophique, je vous laisse découvrir le livre de Charles Pépin pour cela mais bien de regarder en quoi ces ETS font vivre chaque année aux participants les composantes d’une belle rencontre au sens partagé par le philosophe )
sortir de chez soi
Pour vivre des rencontres, il faut se rendre disponible à celles-ci en « sortant de chez soi » comme le partage Charles Pépin. Sortir de chez soi, c’est selon lui “sortir de soi, rompre avec son quotidien lénifiant, quitter sa zone de confort, se bouger pour faire bouger les choses”. Le quotidien dans nos métiers du tourisme ne peut toutefois pas vraiment être qualifié de lénifiant (ôtant toute énergie, qui rend mou…) mais une certaine routine peut s’installer parfois au travail et nécessiter à certains moments d’être chahutée en sortant de chez soi.
Sortir de chez soi, c’est entrer dans un espace temps différent
C’est tout d’abord s’accorder ces deux, trois jours pour se rendre aux rencontres dans un planning pourtant bien chargé. C’est mettre toutes les chances de son côté pour être vraiment disponible à ce qu’on va découvrir en ayant le courage de couper ses notifications (mails, réseaux sociaux…). Bon, on peut tous se l’avouer, il y a encore un peu de boulot sur le sujet mais réussir à être vraiment présent ici et maintenant, c’est pouvoir s’ouvrir pleinement à la rencontre. Et puis c’est se glisser dans ces deux, trois jours comme si c’était un espace hors du temps un peu comme suspendu dont on ne sait plus vraiment à la fin si on a passé trois, quatre jours ou une semaine tous ensemble.
Sortir de chez soi, c’est lâcher des attentes trop fortes de performance
C’est lâcher son envie de tout voir, lâcher son besoin de maîtriser son planning au millimètre, lâcher la pression qu’on s’est mise de revenir avec le contenu sur ce sujet précis. Lâcher ses attentes trop fortes, c’est se rendre compte qu’à être tellement focalisé sur ses objectifs on passe complètement à côté de l’imprévu. Sortir de chez soi serait donc accepter de rater des choses, d’assister à une conférence non prévue, d’accepter de se tromper sur nos objectifs et d’avoir confiance qu’on trouvera précisément ce dont on avait besoin à ce moment là. C’est selon Charles Pépin “se lancer mais moins tendu vers l’objectif que l’esprit ouvert, moins concentré sur le but qu’attentif à tout le reste”. Tout un programme 🙂 !
Sortir de chez soi, c’est bien évidemment sortir de son lieu physique habituel
C’est être happé par le majestueux Palais Beaumont. C’est ne pas rester insensible à cette vue incroyable sur la chaîne des Pyrénées. C’est déambuler dans les rues animées et désertes (selon l’heure à laquelle on les fréquente) de Pau. C’est retrouver avec plaisir les terrasses des pubs du boulevard des Pyrénées. C’est finalement se laisser porter par tous ces lieux, qu’on perçoit sous un autre jour parce que justement on est en bonne compagnie.
POUR RENCONTRER L’AUTRE
“Le trouble, la curiosité, la reconnaissance et l’envie de se lancer sont les premiers signes de la rencontre en train de se faire” – Charles Pépin
Rencontrer l’autre pour m’enrichir de son regard et être curieux de sa différence
Il y a vraiment rencontre lorsque l’on réussit à regarder le sujet à travers le regard de l’autre. C’est par exemple assister à une conférence et être surpris par une perspective inattendue. C’est réussir à se plonger pleinement dans l’univers de l’intervenant pour voir le sujet dans ses yeux. C’est également après une conférence poursuivre la discussion en challengeant nos idées naissantes avec la sympathique gang québécoise. Tout cela fonctionne, si l’on fait un peu de place au non jugement, au « ok, je ne sais pas » et je fais le pari que ta différence va enrichir ma vision.
Rencontrer l’autre pour reconnaître ma propre valeur
Il arrive parfois des moments où on attend avec impatience cet atelier, cet intervenant mais où une certaine déception arrive “Je suis déçu car je n’ai rien appris de spécial, il n’y a rien de neuf dans ce qui a été présenté”. Alors il n’y a peut-être rien de neuf parce que vous faites probablement déjà beaucoup sur ce sujet dans votre territoire et ça c’est déjà une information. Prendre conscience du travail déjà accompli est aussi précieux que de voir tout le chemin qu’il reste à faire. C’est finalement reconnaître la propre valeur de son travail et ça, c’est important !
Rencontrer l’autre pour me donner la force d’y aller vraiment
Certaines fois, on est surpris par la personnalité d’un(e) intervenant(e) qui possède « un je ne sais quoi qui nous touche« , une qualité, une posture qu’on peut même parfois jalouser. Et parfois un moment inattendu se produit en plénière, un moment où on ressent qu’on est tous en train de vivre la même chose (un peu comme quand on assiste à un concert ou lorsque l’on va au cinéma), un moment qui nous fait partager une émotion collective commune, qui nous fait comprendre qu’on a envie d’aller tous dans le même sens. Ces émotions sont précieuses pour nous donner la force d’y aller vraiment quand on sera de retour dans notre quotidien.
pour se rencontrer soi
Se découvrir soi dans ce qui compte vraiment pour nous
C’est être interpellé lors d’une conférence par les valeurs défendues par une destination ou par les convictions d’un manager et comprendre que oui cela compte beaucoup pour nous aussi. C’est aussi se retrouver face à ses contradictions en réalisant que cet intervenant a mis en place ce projet qui nous tient vraiment à cœur alors que nous, nous sommes très occupés à nous laisser manipuler par cette petite voix qui nous dit « qu’avec notre contexte (élus, budget….) ce n’est vraiment pas possible ». Et face à cette dure réalité, finir par accepter que ce ne sont que des peurs et qu’on peut les dépasser. Autant de prises de conscience qui nous permettent de comprendre ce qu’on veut, ce qu’on ne veut plus et ce qu’on doit peut-être lâcher….
Se découvrir soi dans le dépassement de soi
Demandez cette année à Marion Oudenot, Caroline Le Roy et Laurence Giuliani, qui ont assuré un 15 chrono (le format TEDX des ETs) s’il ne leur a pas fallu une dose de courage et d’audace pour assurer cette belle performance. Observez cette émulation, qui est en train de naître pour la prochaine édition des ETs de quelques femmes qui se disent « ok je relève le pari pour 2022 et moi aussi, je me lance dans un 15 chrono”. Faire un 15 chrono, une conférence, un atelier, c’est découvrir qu’on est capable de se dépasser, de déployer des ressources dont on ne se sentait pas capable et tout cela fort du soutien et de la bienveillance des participants.
Se découvrir soi encore un peu plus
Etre soi encore plus, c’est accepter d’oser tomber le masque en lâchant son identité professionnelle, de ne plus juste être le directeur-trice de l’office de tourisme de … , le community manager de …., le responsable de la communication de … C’est aussi accepter de montrer une autre facette de soi en partageant ses talents de barman, de DJ, de danseur, d’acteur, d’humoriste même. C’est accepter le temps d’une soirée ou de toutes ces rencontres de montrer un peu de sa vulnérabilité…. et peut-être même qu’un jour on osera présenter tous nos échecs au travail, l’abandon suprême de l’égo 🙂 “….
Et pour ceux qui auraient encore des doutes, voici quelques preuves avec les photos de la talentueuse Maria Albérola.
Alors oui les rencontres nationales du etourisme portent bien leur nom ! Sortir de sa structure, sortir de chez soi, de soi, c’est oser prendre le risque de la rencontre, de la rencontre avec le monde qui nous entoure, avec les autres et avec soi-même. Les rencontres du etourisme ressemblent fort à un format hybride de voyage, ni tout à fait voyage d’affaire, ni tout à fait voyage de loisirs, comme si le meilleur des deux avait été retenu, avec un cadeau à la fin, celui de cette petite transformation en soi, celle que l’on ressent quand on a vécu un beau voyage.
Et pour tout ça, un grand merci à Charlène, Ludo, Laurent-Pierre et tous ceux qui contribuent à ce que cela soit possible et à tous les participants qui apportent à chaque édition une saveur toute particulière.