Ces dernières semaines, tous les médias sortent leur sujet sur le tourisme de masse qui ferait des ravages. On est bien d’accord qu’il est nécessaire de mieux gérer les flux mais n’y-a-t-il pas un risque à force de voir se développer ce tourisme bashing?
Avec l’arrivée des vacances d’été, les médias se lâchent ! J’ai le sentiment de voir de partout le secteur du tourisme être pointé du doigt ! Articles, reportages TV, animation sur les réseaux sociaux… à en croire les médias, le tourisme est en train de devenir le principal mal de la société alors que l’été n’est même pas encore là ! Et malgré mon engagement quotidien en faveur d’un tourisme plus durable à travers l’association Acteurs du Tourisme Durable, je dis attention !
Oui ! Il y a des situations et des destinations fragiles, à la fois économiquement et socialement. On a encore pu le voir avec la mise en place de portiques à Venise, pas forcément bien apprécié par les habitants qui rejette cette disneylandisation de leurs rues. Le JT de 13h de France 2 a aussi présenté des sites menacés par le tourisme comme la célèbre Plage de Ko Phi Phi Le en Thaïlande ou encore le Machu Picchu, l’Île de Santorin en Grèce ou encore Dubrovnik en Croatie.
Derrière ces alertes des médias, j’ai un peu peur que s’installe une gronde générale des habitants face au développement du tourisme dans tous types de destinations. Et bien qu’il soit plus que nécessaire de mesurer le nombre de visiteurs, leurs impacts et leurs dégradations potentielles, il est aussi plus que nécessaire de faire comprendre aux habitants que le tourisme représente une manne financière et sociale importante pour le développement économique dans les destinations.
J’en discutais encore récemment avec des professionnels du tourisme dans les Alpes qui ne comprenaient pas l’attitude des habitants qui deviennent plus des consommateurs de leur territoire que des acteurs. Ces derniers aimeraient donc avoir à la fois des services publics performants, des commerces de proximité et un terrain de jeu pour leurs loisirs sans avoir à les partager avec des touristes de séjours ou des excursionnistes… Dans la situation économique de nos territoires en particulier en milieu rural, cela me semble complexe, non?
Mais alors que faut-il faire pour les élus, pour les offices de tourisme, pour les professionnels du secteur ?
Encore une fois, il s’agit de trouver un équilibre dans le développement touristique. Et pour trouver un équilibre, il faut de la mesure, des mesures et donc des données pour analyser, réfléchir et agir ensuite.
Le travail qui est fait actuellement par des acteurs comme Orange avec Flux Vision mais aussi des start-up comme VisitData, incubée au Welcome City Lab est plutôt intéressant. On se dit que nous aurons prochainement des outils performants pour analyser en temps réel les flux touristiques et prendre les décisions adéquates de manière réactive (encore faut-il que les institutions intègrent ces éléments dans les réflexions quotidiennes…) pour mieux réguler.
Puis, il s’agit pour les élus locaux d’avoir le courage de prendre des décisions ! Tout d’abord, il va être important de reprendre la discussion avec les habitants afin de réexpliquer les choses concernant l’économie locale. Il s’agira d’utiliser tous les moyens (médiaux locaux, gazette, réseaux sociaux, etc.) pour sensibiliser au rôle du tourisme, à son importance, aux choix en matière de développement et d’investissement. Cette communication interne aura pour objectif de transformer les habitants de consommateurs à véritables acteurs et ambassadeurs du territoire et de la destination. On ne voit encore que trop peu les élus prendre la parole sur les réseaux sociaux pour expliquer leur position et leur choix en matière de développement touristique. Pourtant, c’est de cette manière que les habitants apprendront et comprendront qu’un touriste est une personne importante pour l’économie locale et donc pour leur quotidien tout au long de l’année.
Enfin, il s’agira de revaloriser l’humain et la rencontre dans le tourisme local. Même si je ne suis pas toujours d’accord avec les annonces de l’Organisation Mondiale du Tourisme, je pense qu’ils ont raison quand ils montrent les impacts positifs du tourisme dans la rencontre, dans l’échange interculturel, etc. Et dans ce cadre-là, c’est aussi à nous de raconter de belles histoires de rencontres, de partage, d’échanges, etc. La recherche d’expériences passera par de belles émotions. L’article récent du Monde sur le manque de débit d’Internet à Cuba m’avait justement choqué…
« Quatre jours que je n’arrive pas à aller sur Instagram », dit-elle en sanglotant. Ses six cents « followers » ne verront ni le plat de langoustes qu’elle a photographié à midi, ni ses lascifs clichés de plage, ni cette « si subversive » duckface devant une affiche de propagande de Fidel Castro. « A quoi bon partir en vacances si c’est pour ne rien montrer aux autres ? », dit-elle dans un soupir entre deux reniflements.
Souhaitons-nous réellement de ça dans l’avenir comme visiteurs sur nos territoires ? A nous de les pousser à lever le nez des téléphones, à vivre pleinement des expériences pour ressentir des émotions et créer des souvenirs ! L’instagramabilité des destinations passera aussi par des histoires partagées et non pas uniquement par des portraits sans âme.
Enfin, pour finir, ce papier ne doit pas cacher les choix qui devront être pris parfois pour réguler, pour protéger nos patrimoines, de manière pragmatique. On dénombre de plus en plus de voyageurs domestiques et internationaux en France et dans le monde. Les destinations ne sont pas extensibles et le tourisme ne peut être exempté de ses impacts sociales, climatiques et environnementales dans les destinations. Parfois, il faudra donc faire des choix, avec courage, et ne pas juste regarder le pilier économique et financier et le court terme.
A bientôt pour de nouvelles réflexions,