Choisir son camp en matière d’intelligence artificielle, vraiment ?
Le monde n’est pas si simple et l’âge avançant, quel que soit le sujet, j’ai tendance à chercher le juste milieu. L’Intelligence Artificielle est devenue un sujet brûlant et on peut aisément trouver des experts sensés tant parmi les « anti » que les « pro » I.A..
Cela démontre à la fois la complexité de la question mais également le fait qu’aucune certitude n’est permise en la matière. Il est par contre indéniable que nous sommes face à un momentum historique incontestable, bien plus fort que l’arrivée du web dans les années 90. Une révolution qui impactera notre civilisation au moins aussi fortement que l’imprimerie de Gutenberg. Le contexte est par contre fort différent: nous sommes à l’heure de la mondialisation et du capitalisme dans sa forme extrême; l’heure n’est plus aux sages mais aux audacieux et aux apprentis-sorciers. Certains sauront utiliser l’I.A. pour le bien de tous tandis que d’autres, volontairement ou involontairement commettront les pires imprudences. Cet article, sous forme de carte blanche, abordera d’abord les questionnements et craintes liées à l’intelligence artificielle pour se conclure ensuite sur une note plus positive en termes d’expérience client dans le tourisme. Je tenterai de rester neutre même si cet exercice est, pour un être humain, je le crois, quasi impossible quel que soit le sujet. Mais sur ce point, l’I.A. et l’humain sont-ils, seront-ils devrais-je dire, finalement si différents ? Les actualités récentes semblent démontrer que la perfection, qu’elle soit artificielle ou humaine, n’est pour l’instant pas de ce monde…
Des craintes légitimes, de l’espoir et du tourisme
Je n’aborderai pas les questions liées au « remplacement » de l’humain par l’I.A. dans de nombreux métiers; le sujet est déjà fort débattu et pour ma part, je ne puis que constater la disparition de différents métiers au profit d’autres depuis la nuit des temps: connaissez vous encore des betteraviers, des bourreaux ou des allumeurs de réverbère aujourd’hui ? Bien sûr que non mais vous connaissez par contre bien entendu des techniciens en électronique, des coaches, des spécialistes en marketing ou en neurosciences, bref, des professionnels de disciplines encore inconnues il y a moins d’un siècle.
Ce qui m’intéresse, dans un premier temps, ce sont les actualités plus ou moins récentes liées au développement de l’Intelligence Artificielle avec, vous allez le voir, des choses enthousiasmantes et d’autres bien plus inquiétantes. Commençons par ces dernières. Je vais vous livrer quelques actualités qui parlent, entre autres, de suicide encouragé par l’I.A., de prises de positions surprenantes mais également des Lois de la Robotique d’Isaac Asimov, un génie que l’on semble oublier à l’heure où sa vision est plus pertinente que jamais. Ensuite je vous livrerai le témoignage d’une heureuse utilisatrice de l’I.A. qui a vécu un séjour touristique réussi !
Du côté des inquiétudes
L’actualité récente en lien avec l’I.A. peut susciter des inquiétudes. Bien sûr, certains médias, particulièrement chez les francophones ont une curieuse tendance à diaboliser systématiquement quand ils le peuvent les évolutions technologiques. Néanmoins, quelques faits récents ont de quoi interpeler.
À commencer par ce qui pourrait être une « histoire belge » mais qui n’a rien de drôle, bien au contraire. En mars dernier, un trentenaire du Plat Pays, marié et père de famille s’est donné la mort; un acte véritablement encouragé par une I.A. via un chatbot conversationnel. Selon ce chatbot nommé Eliza, la victime, obsédée par l’environnement, ne pouvait logiquement trouver d’issue à son combat écologique que dans la mort. Vous trouverez ici plus d’informations sur ce fait divers.
Plus récemment, Geoffrey Hinton, un des pères fondateurs de l’intelligence artificielle, a démissionné de chez Google. Selon ce dernier :
Hinton rejoint ainsi la cohorte de plus en plus longue des experts de haut rang qui depuis feu Stephen Hawking s’accordent à dire que l’on va quelque peu trop vite en besogne avec l’I.A. et qu’il est plus que temps de prendre un peu de recul et de prudence.
L’université d’Oxford tire elle aussi la sonnette d’alarme et estime qu’à terme, l’I.A. robotique devrait arriver à la conclusion que l’humain est un « concurrent » dans sa recherche de ressources et d’énergie, voire un obstacle pour atteindre ses objectifs.
Bon je m’arrête là avec les nouvelles alarmistes; l’actualité est déjà bien assez triste sans l’I.A..
Les lois de la robotique d’isaac asimov
Isaac Asimov était un écrivain américain et un professeur de biochimie à l’Université de Boston. Il est surtout connu pour ses œuvres de science-fiction. Auteur multi-récompensé et considéré comme l’un des cinq auteurs majeurs de la science-fiction du 20è siècle, Il a notamment consacré un cycle de 6 romans aux Robots, cycle qui porte d’ailleurs ce titre. C’est cette oeuvre qui a inspiré le film I, Robot avec Will Smith (avis personnel: ce n’est pas la meilleure adaptation d’une oeuvre d’Asimov).
Si je vous parle d’Isaac Asimov, c’est surtout parce que c’est dans un de ses romans (Une première fois dans sa nouvelle Cercle vicieux, et ensuite dans le Cycle de Fondation, tome 4) qu’il va définir les trois lois de la robotique, à savoir:
- Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, en restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ;
- Un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la première loi ;
- Un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n’entre pas en contradiction avec la première ou la deuxième loi.
Plus tard (Dans le cycle Fondation – Foundation and Earth, 1986), Asimov ajoutera une quatrième loi, la Loi Zéro : Un robot ne peut nuire à l’humanité ni laisser sans assistance l’humanité en danger.
Pour ceux qui en 2023 considèreraient encore à tort la science-fiction comme un genre littéraire mineur, voici les raisons pour lesquelles il n’en est rien et surtout, pourquoi je vous parle d’Asimov et de ses fameuses lois de la robotique. Rappelons qu’Asimov était également un chercheur universitaire et qu’il continuera jusqu’à sa mort à faire évoluer ces lois, conscient de leur pertinence pour les défis du 21è siècle (Asimov décède en avril 1992). Dès 2015, les parlements français et européens ont ouvert des débats pour discuter de l’intégration des lois d’Asimov. Le débat se poursuit encore et, entre autres, les chercheurs en Droit de l’Université de Haute Alsace s’y sont aussi intéressé.
On sait qu’en matière de technologies nouvelles, la législation prend souvent trop de retard face à la vitesse des développements; on a déjà connu ce phénomène à l’arrivée du Web. Le problème aujourd’hui, plus que jamais, c’est que l’I.A. avance à pas de géants et sans garde-fou.
Les craintes exprimées évoquées plus haut sont donc bel et bien légitimes mais nous disposons déjà, entre autre grâce à Asimov, de bases de réflexion solides pour y faire face.
Un séjour réussi À ANNECY grâce à chat GPT
On termine sur une note plus positive en terme d’expérience client avec l’I.A., bien que cette info pose aussi la question de la plus value de l’agent de voyage ou du conseiller en séjour avec les progrès en cours… Mais bon, ce sera l’objet d’un autre article.
La presse relayait il y a un peu plus d’une semaine l’histoire de cette maman qui cherchait un séjour sympa à faire avec son fils. Pour ce faire, elle eut l’idée de questionner Chat GPT auquel elle a donné quelques informations parmi lesquelles l’âge de son fils, les dates du séjour, et ses critères de choix : une zone calme avec « des belles fleurs, un beau petit lac, des pavés au sol et de la convivialité ».
Chat GPT lui a dès lors suggéré Annecy comme destination avec diverses justifications de cette suggestion par rapport à ses critères.
La jeune maman se dit alors « pourquoi pas » et poursuivit sur sa lancée en demandant au robot conversationnel de lui concocter le programme idéal.
Le résultat ? « Un sans-faute » selon celle-ci, le programme ayant même pensé à intégrer une activité particulièrement adaptée au petit garçon, encore une fois justification à l’appui.
La maman et son fils ont respecté à la lettre le programme suggéré et sont rentrés ravis de leur séjour annécien.
Personnellement, ce que je trouve intéressant dans ce cas-ci, ce n’est pas tant le programme concocté par l’I.A. mais plutôt sa capacité dans un premier temps à suggérer une destination à laquelle cette dame n’aurait peut-être jamais pensé (et qu’elle a adorée) ou que très peu d’êtres humains n’auraient pensé lui souffler avec des critères aussi vagues. Cela démontre probablement ici encore la pertinence des sites de destination (voir l’article de Jean-Luc Boulin de la semaine dernière) et la nécessité, avec nos contenus, de « caractériser » nos localités.
Enfin, c’est aussi peut-être l’occasion pour des destinations plus modestes en termes de notoriété d’émerger dans une offre touristique dense et hautement concurrentielle.