La pension des fuites #3

Publié le 10 avril 2020
2 min

Troisième épisode de notre feuilleton du samedi…aujourd’hui dans l’interstice du Vendredi Saint. Nous relatons les merveilleuses aventures de Monsieur Sauternes au temps du Covid 19. Le tout en moins de 2019 signes. Ami lecteur, chère lectrice, tu peux aussi commencer par le début qui a été publié ici, avec les principes du feuilleton et l’épisode 1. Puis retrouver l’épisode 2 ici. Bonne lecture et bonne chasse aux oeufs de Pâques dans la douche, sous le frigo, dans le tas de fringues sales qui attendent, ou dans l’écuelle du chat ! Enfin, là où tu peux trouver des chocolats compte tenu du confinement. 

Les aventures de Monsieur Sauternes au temps du Covid 19 par François Perroy – Couverture par Pierre Eloy

Monsieur Sauternes courait dans les bois dont il connaissait les chemins. Au début du confinement, il éprouvait son corps sans se munir de l’attestation de déplacement. Le couvert forestier, constitué d’une mappemonde de houppiers, le protégeait dans son évolution.

Sauternes avait organisé un potager clôturé. Les chevreuils le considéraient comme un aimable garde-manger. Son voisin, le vieux Monsieur Merlot, l’ordonnait pendant ses absences. Arrivant en cette fin d’hiver à la douceur émolliente, Sauternes avait constaté l’impréparation du jardinet.

Monsieur Merlot dirigeait l’exploitation Le Lapin de Barrade. Il y vendait des lapins vivants aux enfants heureux. Mais le plus souvent, les lapins quittaient les lieux vidés, sans cérémonie. En entier ou en morceaux. Sauternes avait repéré des lapins en liberté dans son jardin malgré la clôture à maille carrée qui entourait la petite ferme. Il se présenta pour saluer son voisin et l’alerter de cette évasion. Il voulait aussi réserver son premier lapin de garenne en vue de son prochain batch cooking de reclus.

Les casiers étaient ouverts. Monsieur Merlot était absent. La maison était fermée. Le chien Médoc trainait sur place. Il fit la fête au visiteur et le suivit lorsque Sauternes rentra chez lui pour téléphoner à Merlot. La ligne fixe ne répondait pas. Les maisons voisines étant inoccupées, il appela le médecin du canton. Ce dernier, difficilement joignable, lui indiqua que Monsieur Merlot, pris de toux et mal en point était parti à l’hôpital. Il ajouta qu’on ne pouvait lui rendre visite.

Sauternes et le chien Médoc s’entendaient bien. Leurs journées solitaires passaient lentement. Des grésillements de drones parleurs avaient remplacé les hélicoptères pour empêcher les promenades à l’océan.

Le beau temps rendait paranoïaque. Sauternes ne voulait renoncer à son running, mais il redoutait d’être mis à l’amende. La surveillance qui s’organisait par le transfert des données d’utilisation des smartphones le préoccupait. Un matin, alors que les mauvaises nouvelles broyaient sa radio à piles, il découpa des bandes de fixation et colla son smartphone, GPS ouvert, sur les flancs de Médoc.

Il referma à clef le portillon du jardin et happé par le rivage, il sortit courir. Médoc, énervé par cette prothèse malvenue tourna bourrique pour l’enlever. Pendant ce temps, Sauternes avalait les kilomètres de son jogging millésimé dans la pinède de Bourrindays. 

 

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François Perroy est aujourd’hui cofondateur d'Agitateurs de Destinations Numériques et directeur de l’agence Emotio Tourisme, spécialisée en marketing et en éditorial touristiques. Il a créé et animé de 1999 à 2005 l’agence un Air de Vacances.  Précédemment, il a occupé des fonctions de directeur marketing au sein de l’agence Haute Saison (DDB) et de journaliste en presse professionnelle du tourisme à L’Officiel des Terrains de Camping et pour l'Echo Touristique. Il [...]
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