Mettre du beau dans 2024.

Publié le 10 janvier 2024
4 min

Débutons cette année par une grande inspiration, et quelques inspirations.
Un article plus en images qu’en mots, pour reprendre en douceur…

It is sometimes like « déjà vu »

En matière de communication touristique, on peut penser que le « beau » est à l’honneur, chaque destination mettant en avant ses paysages, ses monuments, ses jolis villages, et l’on sait que la France ne manque pas d’atouts.

Pourtant, lorsqu’on consulte les magazines, les comptes Instagram ou les sites internet des destinations, on peut parfois ressentir quelque chose de l’ordre du « déjà vu ». Les standards ont la peau dure et les tendances annoncées chaque année donnent le diapason des publications à venir. Pantone va même jusqu’à décréter quelle sera la couleur de l’année.

De même, l’iconographie proposée dans les supports médiatiques des destinations répondent à des normes aussi incontournables à un instant T que rapidement obsolètes, tant dans les prises de vues, la colorimétrie des images ou encore leur mise en scène. Combien de combis WV ont parcouru les pages des magazines de destinations, aux côtés de ce couple épanoui dégustant un verre de vin au milieu de vignes baignées de la lumière de cette golden hour chère aux photographes de tous acabits ?

Alors, peut-être pourrions-nous changer de point de vue, et pour ce faire s’attacher les services créatifs d’artistes, notamment visuels.

La photographie, on vient de le voir, est le média de prédilection du tourisme. Dans les mains d’un artiste, l’appareil photo devient le révélateur d’un autre regard, d’une autre perception sur un lieu donné. C’est ce qu’a pressenti Suisse Tourisme dès 2017, en donnant carte blanche à 5 photographes internationaux. Chacun a passé entre quatre et six semaines en Suisse, libres de leurs itinéraires, pour y porter un regard « étrangement familier », ce qui donnera son nom à une exposition au Musée de l’Elysée à Lausanne où les clichés ont été exposés.

Crédit Alinka Echeverria
Crédit Zhang Xiao

Ici, les photographes se jouent des codes de l’imagerie de paysage classique, en créant un décalage culturel, par une mise en scène affirmée ou par un instantané capté sur le vif, à la manière d’un touriste espiègle.

donner un supplément d’âme

C’est ce qu’a admirablement réussi Giulia David, lors de son séjour québecois à Val-Jalbert, village historique des années 20. Cette illustratrice s’est jointe à l’équipe des Francophonies de l’Innovation Touristique pour y exercer ses talents de graphic recorder (terme plus fidèle à sa pratique que « facilitatrice graphique », tant elle sait capter et retranscrire la science de l’instant et le sel des échanges). A l’issue de cette semaine d’immersion dans ce village-usine aujourd’hui devenu lieu de patrimoine et de transmission, elle a réalisé un carnet de voyage mêlant photos personnelles et illustrations en sur-imposition.

Crédit Giulia David

La mise en abîme de l’illustratrice regardant son sujet plonge le lecteur dans le décor, à ses côtés, ce qui crée une micro-relation avec l’autrice du visuel, dont le regard est assumé et personnifié. Sa sensibilité transparaît dans cette technique de collages (dont il est à noter que c’est une des 5 tendances graphiques à suivre en 2024 selon la vénérable institution Canva).

Crédit Giulia David

DE BEAUX CARNETS DE VOYAGE

C’est la première forme qu’a prise la belle opération « Les Accros du peignoir », initiative portée par Léa Lemoine, chargée de patrimoine et d’innovation pour la Route des Villes d’eaux du Massif Central. Avec l’appui de deux scénaristes, elle a invité dès 2016, 12 carnettistes à arpenter la destination, ce qui donnera lieu à une exposition, un webdocumentaire et une websérie. Depuis, « l’épidémie de bien-être » a gagné toutes les villes d’eaux, offrant aux visiteurs et aux curistes de véritables Voyages Artistiques autour d’un storytelling décalé.

Crédit Catherine Gout

TRANSMETTRE de la joie BRUTE

Vous le savez peut-être, Robert Doisneau a passé d’innombrables vacances dans le Périgord, il arrivait en train en gare de Carlux. Probablement incapable de délaisser son appareil, il a laissé à la postérité des clichés qui respirent la joie, la spontanéité, le goût suave des jours heureux et l’excitation des congés d’été, tout comme les clichés de Raymond Depardon s’exaltent d’un concentré de bonheur franc et salé.
C’est ça, les vacances, non ?

Crédit Robert Doisneau
« Méditerranée », Raymond Depardon

parler à tou.te.s

Initiative intéressante, le All-Inclusive Photo Project a eu pour ambition de casser les clichés du tourisme, en faisant appel à des photographes de renommée, pour tenter de combler le manque de diversité dans l’imagerie marketing touristique normalisée et standardisée. Ci-dessous, Naima Green a convié une mannequin à une séance de yoga sur le pont d’un bateau de croisière, cherchant à montrer que « la blancheur n’a pas le monopole des loisirs », comme elle l’a indiqué dans un article publié par Vice. On verra par la suite que des annonceurs importants tels que Center Parcs suivront le mouvement pour inclure plus de représentativité dans leurs espaces publicitaires.
Le sujet de l’inclusivité et du rôle à jouer par les OGD en la matière a notamment été traité lors des dernières Rencontres du etourisme lors d’un atelier dédié.

Crédit Naima Green

Bonne résolution ou pas, voici quelques mantras à garder au fond de sa poche : faire un léger pas de côté, tenter de porter un autre regard sur nos destinations, essayer de lâcher prise avec les standards et les exercices imposés, chercher à casser les codes du genre pour révéler ce que l’on est vraiment, c’est peut-être un petit bout d’audace à poursuivre, non ?

Je partage l'article
Voir les commentaires
1
31 articles
Laurence Giuliani dirige Akken, agence de production sonore pour les destinations touristiques et les lieux de culture. Anciennement responsable d'un Office de Tourisme en milieu néo-rural (ou péri-urbain, comme vous voulez), manager d'artistes, productrice en label indépendant, Laurence cultive la curiosité comme carburant du quotidien. Ses marottes : le son, le tourisme culturel et le "komorebi", cette lumière qui filtre entre les arbres, comme des fêlures de timidité entre les [...]
Voir les 1 commentaires
Également sur etourisme.info