Très cher Benki Piyako,
C’était un honneur de vous rencontrer lors de ce Congrès mondial annuel de l’OITS (Organisation Internationale du Tourisme Social) qui s’est déroulé ce vendredi 19 octobre à Lyon. En tant que chef spirituel du peuple Ashaninka d’Amazonie, j’ai senti votre sincérité dans vos mots d’urgence et de rupture nécessaire pour changer de modèle. Je pense que votre mode de vie, au plus près de la nature, en harmonie, a beaucoup à apporter à notre société occidentale.
Vous m’avez avoué que vous sentiez l’arrivée d’un cataclysme. Sachez que chez nous, en France, le débat autour de l’effondrement de notre civilisation commence à pointer son nez. Même le 1er ministre disait que cela l’inquiétait sans cesse, avant l’été.
Pour nous, acteurs du tourisme, tout ceci nous inquiète et nous pousse à agir vraiment. Nous avons présenté dans ce sens, lors de la clôture des dernières rencontres du etourisme #ET14 à Pau, un manifeste pour engager les offices de tourisme et autres organismes de gestion des destinations dans une lutte essentielle contre le dérèglement climatique. Mon discours ici à Lyon était du même acabit : « Moins mais mieux ».
Du courage de dire moins. Quel courage?
Il y a quelques jours, une experte historique du secteur en Angleterre, Anna Pollock, saluait ma position « courageuse ». Je n’ai pas compris pourquoi elle utilisait ce qualificatif car, avec l’augmentation des flux, notre industrie n’a rien de durable. Les prévisions de l’association internationale du transport aérien IATA qui tablent sur un doublement du nombre de passagers, soit 4.2 milliards, pour 2037, sont une véritable hérésie ou du moins une vraie catastrophe climatique.
Selon moi, et comme je l’ai déjà dit dans un précédent article, nous devons absolument repenser les critères de performance et de croissance du tourisme. Vous sembliez valider cette vision. Mais vous avez complété pendant notre entretien que le voyage devait être un passeur de conscience. Il devrait permettre aux voyageurs de faire ces rencontres qui vous transforment intérieurement. Et je suis d’accord ! Dans le « moins mais mieux », il y a cette notion d’exceptionnel afin que le voyage ne soit pas juste un produit que l’on jette dans son caddie pour le consommer.
Expérimentons ensemble de nouveaux critères de performance du tourisme
J’ai tenté de présenter des éléments à notre ministère en charge du tourisme afin de les faire infléchir sur leur objectif d’accueillir 100 millions de touristes internationaux d’ici à 2020. Ce chiffre n’a pour moi aucun sens et ne montre pas réellement les ambitions de la France, surtout sur les questions climatiques ou sociales. Je suis d’ailleurs en train de leur préparer une note avec quelques critères complémentaires autour du bilan carbone des voyageurs, du bien-être des habitants ou encore de la qualité de la biodiversité locale.
Je reste persuadé que cela passera par une ou plusieurs expérimentations en local afin de montrer la réalité et la faisabilité de cette notion de performance touristique du futur. En posant une simple question sur mon compte Facebook, j’ai senti une forte volonté de participer à la coconstruction de cette nouvelle définition. Pour être précis, je vous invite à m’envoyer un email afin que je vous invite sur le groupe de travail Slack que je viens de lancer.
Merci de m’avoir lu Benki et sachez que je serais votre relais en France pour continuer à diffuser la conscience climatique et environnementale dans le monde du tourisme. Prenez bien soin de vous et de votre Amazonie.