Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, la loi Le Meur (dite aussi « loi Airbnb » ou « anti-Airbnb », selon les points de vue) est entrée en vigueur après des mois de tergiversations dignes d’un conseil d’élimination de Koh-Lanta. Et la sentence a été sévère pour les chambres d’hôtes — mais, espérons-le, pas irrévocable 😀
Mais comme si cela ne suffisait pas, cette réforme s’est ajoutée à d’autres changements majeurs, comme la remise en question du seuil de TVA ou l’arrivée de l’IA dans le parcours client. Des nouvelles que certains vivent comme un coup de massue, pendant que d’autres s’interrogent sur l’opportunité d’évoluer ou de se lancer.
Afin d’éviter un malaise général, faisons le point sur ce qui met les nerfs des gestionnaires de chambres d’hôtes à rude épreuve (et sans doute les vôtres aussi en étant en première ligne) et sur les lueurs d’espoir qu’ils pourraient entrevoir…
Attention : Ce billet a une DLC très limitée aux vues de la vitesse à laquelle tout se fait et se défait en ce moment… Alors, si vous le lisez plusieurs semaines après sa publication, vérifiez si tout est encore d’actualité !

Nouvelle fiscalité pour les chambres d’hôtes : entre craintes et injustices
Depuis le début de l’année, pas une semaine ne passe sans qu’un propriétaire de chambres d’hôtes ne me confie ses inquiétudes quant à la rentabilité de son activité. Vous devez sûrement entendre la même chose de votre côté, et objectivement, ils n’ont pas tout à fait tort. Voyons cela de plus près.
Loi Airbnb : une addition trop salée pour les chambres d’hôtes en micro-BIC ?
Avant la loi Le Meur, les chambres d’hôtes bénéficiaient d’un abattement fiscal de 71 % sous le régime micro-BIC, avec un plafond de 188 700 € de chiffre d’affaires. Un régime simple et attractif qui permettait d’avoir un revenu imposable limité.
Depuis le 1er janvier 2025, cet abattement est tombé à 50 % et le plafond a chuté à 77 700 €. Conséquence immédiate : un revenu imposable plus élevé et, selon le statut, des charges sociales plus importantes !
> Simulation avec ce chiffrage avant/après, d’un propriétaire de chambres d’hôtes qui réalise 76 000 € de chiffre d’affaires sous régime micro-BIC :

Bilan : une augmentation de 72 % du revenu imposable, pour un chiffre d’affaires identique.
Face à cela, certains vous ont peut-être interrogé sur l’opportunité de passer au régime réel simplifié. Ce système permet de déduire les charges réelles et les amortissements (travaux, entretien, mobilier…), mais il n’est pas adapté à toutes les situations et engendre quelques lourdeurs administratives et financières. Le plus sage est de les orienter vers un expert-comptable ou un fiscaliste pour évaluer l’intérêt de ce choix en fonction de leur activité.
Petit rayon de soleil malgré tout dans cette réforme : l’activité de table d’hôtes conserve son abattement fiscal de 71 % avec un plafond maintenu à 188 700 € (et des cotisations sociales à 12,4 %). Une bonne nouvelle qui risque quand même de donner la migraine au moment de faire les comptes !
Loi Airbnb : un non-sens pour les chambres d’hôtes ?
Initialement ignorées dans les débats de la loi Le Meur, les chambres d’hôtes ont finalement été assimilées aux meublés de tourisme, sans que rien ne filtre avant le vote. Résultat : elles n’ont eu d’autres choix que de subir de plein fouet cette nouvelle mesure.
Pourtant, en tant que professionnels du tourisme, nous savons que ce n’est pas tout à fait le même métier…
- Une activité commerciale à plein temps : les chambres d’hôtes fonctionnent avec une présence quotidienne du propriétaire (petit-déjeuner préparé sur place, entretien du linge, accueil personnalisé, gestion des réservations à la nuitée…). Ce modèle suppose une disponibilité et une implication bien plus importantes qu’une location classique.
- Un impact neutre sur le marché du logement : installées dans la résidence principale, les chambres d’hôtes n’exercent aucune pression sur le marché locatif (qui est LA problématique à l’origine du texte de loi). Par ailleurs, leur nombre reste stable depuis plusieurs années (contrairement aux locations saisonnières).
- Un acteur essentiel du dynamisme du tourisme local : dans de nombreuses zones rurales, elles sont parfois la seule alternative d’hébergement.
Alors oui, il y avait des ajustements à faire sur le marché de l’hébergement touristique en France, mais cette réforme ne semble pas bien calibrée pour les chambres d’hôtes.
Comment les soutenir ? Il n’est jamais trop tard pour agir — même si, on l’a vu, on aurait aimé pouvoir anticiper davantage. Encouragez-les à se mobiliser, seuls ou collectivement, en interpellant les élus locaux ou la ministre du Tourisme. Dans de récents courriers adressés à des propriétaires de chambres d’hôtes, elle laisse entendre que les dispositions fiscales seraient perfectibles et pourraient être discutées dans de futurs débats parlementaires… Affaire à suivre !
Abaissement du seuil de TVA : en sursis, mais pour combien de temps ?
La pilule de la loi Airbnb à peine avalée (et encore !), les gestionnaires de chambres d’hôtes ont vu leur palpitant s’emballer à nouveau. Heureusement, temporairement, pour l’instant.
Initialement prévue pour mars 2025, une nouvelle loi sur l’abaissement du seuil de franchise de TVA à 25 000 € (contre 91 500 € en 2024) aurait obligé un grand nombre d’exploitants à facturer la TVA à leurs clients.

Au-delà du fait que c’est beaucoup de paperasse, augmenter le tarif des nuitées de 10 %, ce n’est pas anodin. Surtout dans un contexte où chaque euro compte pour les hôtes, que la concurrence n’a jamais été aussi forte – entre destinations, mais aussi entre hébergements marchands et non marchands. En 2024, HomeExchange en est un bon exemple, avec un chiffre d’affaires en hausse de 43 %.
Mais face à une forte contestation des auto-entrepreneurs, la mesure a été suspendue jusqu’au 1ᵉʳ juin 2025. Pour l’instant, les seuils restent à 85 000 € pour l’hébergement et 37 500 € pour les prestations de services (comme la table d’hôtes).
Le seuil sera-t-il finalement abaissé, ajusté ou purement abandonné ? Impossible à dire. En attendant, les exploitants doivent rester vigilants, car un changement brutal de TVA pourrait les obliger à repenser leurs tarifs et leur rentabilité.
Intelligence artificielle : rester visible sans perdre le contrôle des réservations de sa chambre d’hôtes
L’IA, on vous en parle souvent ici, et pour cause : c’est la révolution en marche dans le tourisme. Et d’ailleurs, sans surprise, les géants du voyage en ligne ont déjà pris quelques longueurs d’avance pour gagner encore plus de parts de marché. Mais qu’en est-il de vos partenaires chambres d’hôtes ? Se sentent-ils, comme beaucoup, dépassés, sans savoir par où commencer ?
IA et chambres d’hôtes : comment ne pas rater le coche sans s’y perdre ?
L’IA bouleverse le tourisme, et les chambres d’hôtes ne font pas exception. Le problème ? Beaucoup risquent de le subir plutôt que d’en tirer parti. Comme avec la réservation en ligne, ceux qui ne s’adaptent pas pourraient vite disparaître des radars des voyageurs.
Les raisons, vous les connaissez déjà sûrement. Mais je vous ai quand même préparé une courte compil’ à faire lire à vos partenaires ou porteurs de projet.
- L’IA fait désormais partie du parcours client : d’après une enquête Booking relayée par le blog TOM.Travel, près d’un voyageur sur deux utilise l’intelligence artificielle pour planifier son séjour.
- L’IA influence les choix de réservation : les assistants IA, encore plus que les moteurs de recherche, sont capables de suggérer des offres en fonction du profil et des préférences de l’utilisateur.
- L’IA recommande des établissements selon ses propres critères : il ne suffit plus d’être présent sur Google et les réseaux sociaux, il faut désormais créer du contenu pensé pour l’IA.
Comment les aider ? Commencez par partager le « Guide de la découvrabilité à l’ère de l’intelligence artificielle » de IA Tourisme. Un résumé de 21 pages qui explique comment fonctionnent ces algorithmes et quelles actions concrètes mettre en place pour rester visible et compétitif. Des premiers pas essentiels pour les encourager à prendre le train en marche… avant qu’il ne soit plus à portée de vue !

Alliance OTA et IA : quel avenir pour la distribution en ligne de ses chambres d’hôtes ?
Depuis plusieurs mois, les géants de l’intelligence artificielle et du voyage en ligne scellent des alliances pour capter toujours plus de réservations. Une dynamique qui pourrait bien réduire encore un peu plus la marge de manœuvre des hébergeurs indépendants. La preuve avec ces deux exemples…
Dans un article d’Hospitality ON, la directrice de Booking.com France révèle que la plateforme travaille avec OpenAI (ChatGPT) depuis 2022 pour développer des fonctionnalités, comme AI Trip Planner, capables d’aider les voyageurs à matcher avec l’hébergement idéal.
Autre exemple plus inquiétant : ChatGPT teste actuellement « Operator », un assistant capable de trouver et réserver un hébergement directement sur Booking ou TripAdvisor, sans passer par un moteur de recherche ou un site d’hébergeur. Un outil similaire est aussi en développement chez Perplexity.

Même si ces fonctionnalités ne sont pas encore disponibles en France (mais ça ne saurait certainement tarder), les OTA, alliées aux IA, capteront toujours plus de clients. Pour les chambres d’hôtes, cela signifie un risque de dépendance plus fort… et une visibilité qui s’effrite.
Alors que faire ? Ne surtout pas baisser les bras. Selon moi, il reste de la place pour celles et ceux qui savent se démarquer, raconter leur histoire, créer du lien. Mais soyons lucides : ce n’est plus une question d’années, mais de mois. Alors, il va falloir avancer vite et bien avec eux !
Surtout que pour votre organisme de gestion de destination, les conséquences ne sont pas anecdotiques :
- moins d’établissements référencés sur le territoire,
- moins de cotisations versées à l’office de tourisme,
- une baisse de la taxe de séjour collectée,
- et, plus largement, un impact sur l’image du territoire.
Ne dramatisons pas face à ces nouvelles donnes ! Avoir une chambre d’hôtes rentable en 2025, ce n’est pas mission impossible. Par contre, il va falloir, plus que jamais, que les propriétaires remettent en question leur modèle économique, leur positionnement, leur visibilité… Et il faudra peut-être dire définitivement « au revoir » à la Mamie Gisèle de mon précédent article, celle qui ouvrait une chambre d’hôtes pour « rencontrer du monde » sans vraiment penser rentabilité ou stratégie…