Après le test effectué depuis deux saisons sur le territoire des Bouches du Rhône et PACA, Orange avait largement communiqué il y a quinze jours sur la mise à disposition de son offre Big Data, baptisée Flux Vision, permettant à partir de ses 27 millions de clients mobiles en France et 175 millions dans le monde, d’obtenir des données précises, qualifiées et quasi temps réel des mouvements des touristes, résidents ou en transit sur un territoire grâce à la triangulation des portables.
Dans un précédent billet sur les bases de données, nous appelions en toute fin d’article à un accord national avec l’un des opérateurs mobiles et voilà donc que le Rn2d nous annonce jeudi dernier la concrétisation d’un tel partenariat (Cf. le Communiqué de Presse).
Véronique Brizon, qui dirige le Rn2d, a bien voulu nous accorder quelques instants pour préciser les contours de cette initiative qui fait sans nul doute enfin basculer nos organismes de gestion de destinations dans une véritable démarche d’analyse et d’exploitation de Big Data, probablement l’une des plus sensibles qui soient. Autour des Bouches du Rhône s’est monté un groupe de travail restreint qui a construit avec les ingénieurs d’Orange Business Services les contours de la solution déployée. L’objectif est bien de fournir aux ADT un outil d’observation venant compléter ceux déjà existants, afin de répondre à la mission d’accompagnement des professionnels du tourisme. Orange fournit des données quasi-brutes, bien qu’analysées par ses services, afin de laisser aux ADT entière latitude pour ensuite les travailler. Il n’y a pas dans un premier temps d’éléments cartographiés, une prestation intéressante pour ce type de données, et qui pourrait faire l’objet d’une réflexion menée par le groupe de travail pour mieux exploiter et rendre compte des flux observés en quasi temps réel. La datavisualisation constitue à n’en pas douter un élément intéressant de diffusion, comme l’illustrent certains travaux menés déjà par Orange Labs et FaberNovel (Projet UrbanMobs), ceux de l’artiste Eric Fischer à partir des photos géotaggées sur Flickr ou de tweets (voir la carte de l’Europe ci-dessous), ou de l’Esilv dans le projet EarthMapper.
En quasi temps réel, c’est-à-dire à 48h pour les premiers éléments sur un volume global, le temps de les compiler, pré-analyser, et redresser. Un mois de plus est nécessaire pour pouvoir identifier le statut des personnes observés : touristes, en transit ou résidents. Insuffisant pour le moment pour alimenter une stratégie de Yield Management de Destination poussée à l’extrême, mais nul doute que cela pourra d’ores et déjà fournir des éléments permettant de réagir à certaines situations, ou d’anticiper certains effets de flux récurrents pour anticiper des services, notamment d’accueil hors les murs comme on l’évoque dans le Schéma D’accueil et de Diffusion de l’Information (SADI). Ce schéma se trouvera par ailleurs largement renforcé par ces nouvelles de données de flux, bien plus précises que ce que les enquêtes actuelles pouvaient nous fournir.
Au-delà du remarquable échantillon en quantité, c’est sa qualité qui constituera la force du dispositif, puisque l’on pourra déterminer s’il s’agit d’un client français ou étranger, touriste, résident ou en transit, en analysant ses mouvements sur une période plus longue (environ un mois). L’anonymisation garantie et les échanges préalables avec la CNIL interdiront pour l’instant d’aller plus loin avec par exemple des données plus précises telle que la ville d’origine (il va donc falloir continuer de demander le département d’origine à l’accueil de l’office ;-)), la composition du foyer ou l’âge du capitaine (n’est pas Facebook qui veut !).
Chaque ADT pourra observer de 5 à 10 zones infra-départementales, ainsi que des évènements particuliers, l’expérimentation initiale ayant d’ailleurs été mise en oeuvre à l’occasion de Marseille Provence 2013. D’ores et déjà, un tiers des adhérents du Rn2d ont prévu d’adhérer via le partenariat établi à ce dispositif, et cinq d’entre eux se sont déjà lancés dans l’aventure, dont Savoie Mont-Blanc, pour qui l’offre tombe à pic (de Jallouvre…) avec la pleine saison qui débute.
Quant à l’aspect financier…s’il va sans dire que le partenariat signé a bien évidemment pour objectif de négocier en groupe, il comprend une clause de confidentialité qui n’autorise pas Véronique Brizon à nous en dire davantage, même si Tourmag évoquait dans un article de juillet dernier un coût annuel de l’ordre de 15 à 20 000 euros. Au-delà, le Rn2d se fixe comme mission d’homogénéiser l’ensemble des résultats. Les ADT ne disposeront probablement pas toutes des mêmes moyens humains et financiers pour analyser, tirer parti et diffuser les données fournies par Flux Vision, et il va sans dire que de ce point de vue également, un apport méthodologique et une mutualisation au sein du groupe de travail interdépartemental seront probablement les bienvenus.
En terme de diffusion, on imagine bien à quel point les Offices de Tourisme, dans leur mission d’accueil, les sites de visites et de loisirs seront eux aussi friands de disposer de ces éléments. On ose espérer que l’intelligence collective qui sied à ce type de projet, et qui a toujours prévalu en matière d’observation entre les différents échelons territoriaux, saura l’emporter afin d’éviter par exemple qu’une capitale départementale ne doive elle aussi s’équiper au complément de son ADT pour disposer des données les plus fraîches, ou compléter l’offre avec des données plus précises que son ADT ne pourrait financer, et qu’Orange saura comprendre ce type de situation pour s’y adapter !
ADT engagés dans la démarche, c’est avec plaisir que nous recueillerons en commentaires vos premières réflexions sur ce projet…